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Que nous en parlions ou non, les règles prennent beaucoup de place.

L’accès difficile aux produits d’hygiène menstruelle, la disponibilité d’eau potable et d’installations sanitaires et d’hygiène (WASH) et les normes sociétales qui stigmatisent la menstruation sont à l’origine d’une inégalité mondiale. On estime à plus de 500 millions le nombre de femmes et de filles dans le monde qui n’ont pas ce dont elles ont besoin pour gérer leurs règles. Dans les pays à revenu faible et intermédiaire, les données recueillies indiquent que beaucoup de filles cessent d’aller à l’école lors de l’apparition de leurs menstruations, ce qui met en péril leur éducation, leur santé et leur nutrition.

Un récent rapport de Plan International confirme que la COVID-19 aggrave ces défis. Les professionnels de l’eau, de l’assainissement et de l’hygiène interrogés ont identifié les répercussions négatives de la COVID-19 sur la santé et l’hygiène menstruelle. Ces répercussions comprennent la perturbation de l’approvisionnement en produits d’hygiène sanitaire et l’accès restreint aux installations d’eau, d’assainissement et d’hygiène nécessaires.

Les connaissances des jeunes en matière de gestion de l’hygiène menstruelle constituent un facteur déterminant pour la poursuite des études des adolescentes. En plus de prolonger leur éducation, les filles qui restent à l’école continuent d’avoir accès à des programmes scolaires essentiels comme le repas du midi, la supplémentation hebdomadaire en fer et en acide folique (FAF) pour prévenir l’anémie et l’éducation nutritionnelle. Le fait de rester à l’école réduit aussi le nombre de mariages et de grossesses précoces dans le monde.

C’est pour cette raison que Nutrition International intègre la gestion de l’hygiène menstruelle dans ses programmes de santé et de nutrition destinés aux adolescents. L’accroissement des connaissances aide les adolescents à plaider pour eux-mêmes. Pour y arriver, nous développons ou révisons les programmes scolaires existants et les ressources communautaires. Cette étape nous permet d’inclure des sujets tels que la croissance, la puberté et les besoins nutritionnels, la gestion de l’hygiène menstruelle, l’activité physique et la santé globale des filles et des garçons. Le programme intègre également la question de l’eau, de l’assainissement et de l’hygiène, ainsi que des discussions sur l’accès aux produits hygiéniques.

Nous vous présentons ci-dessous le travail de Nutrition International dans trois pays où l’amélioration des connaissances et le renforcement de l’autonomie des adolescents, garçons et filles, donnent une chance aux filles de gérer leurs menstruations en toute confiance. Point final.

Éthiopie

Saisir l’importance : Le manque de sensibilisation à l’hygiène menstruelle a eu des répercussions négatives sur le taux de fréquentation scolaire des filles, ainsi que sur leur participation aux programmes de santé et de nutrition. Selon une enquête régionale de l’UNICEF en 2017/2018, de 11 à 46 % des filles, selon la région, ne vont pas à l’école lorsqu’elles ont leurs règles.

Dans les zones rurales d’Éthiopie en particulier, l’accès limité à des installations d’eau, d’assainissement et d’hygiène adéquates à l’école dissuade les filles d’âge scolaire. Par manque de connaissances, les filles se sentent isolées et font l’objet de discrimination lorsqu’elles sont en période de menstruation. Selon une enquête nationale menée en Éthiopie en 2020, seulement 28 % des filles et des femmes ont déclaré avoir tout ce dont elles ont besoin pour gérer leurs règles. Les conclusions du rapport ne changeaient pas en fonction de l’âge, ce qui laisse penser que le manque de ressources et d’informations à l’adolescence se perpétue à l’âge adulte.

« Mettre fin aux problèmes de règles constitue une composante essentielle de l’ensemble des interventions en matière de nutrition des adolescents en l’Éthiopie, et non un élément isolé. »

Trouver des solutions : Depuis 2019, Nutrition International a soutenu et renforcé la coordination multisectorielle pour les interventions nutritionnelles tenant compte du genre dans 88 districts à travers les régions d’Amhara, d’Oromia, des Nations, nationalités et peuples du Sud (SNNP) et de Sidama. Cela comprend le plaidoyer pour des toilettes adaptées aux filles avec des installations d’eau, d’assainissement et d’hygiène et des informations appropriées sur la gestion de l’hygiène menstruelle. Nutrition International a fourni une formation axée sur les compétences aux directeurs d’école, aux enseignants, aux étudiants champions de la nutrition des adolescents, aux agents de vulgarisation sanitaire et aux prestataires de soins de santé. Produit en Amharique, Afaan Oromo et Tigrigna, le matériel de formation, qui comprend des fiches aide-mémoire comme outil de référence rapide, contribue à améliorer les connaissances, la compréhension et le soutien de la gestion de l’hygiène menstruelle.

Le programme fait aussi participer activement les garçons. Ils apprennent que la menstruation est un processus biologique normal et un signe important de la santé reproductive; elle n’a rien de mauvais, de malsain, de honteux ou de sale. Essentielle pour dissiper les idées fausses et réduire la stigmatisation et l’intimidation, cette composante du programme a aussi aidé les filles à développer leurs propres pratiques d’hygiène menstruelle.

« Mettre fin aux problèmes de règles constitue une composante essentielle de l’ensemble des interventions en matière de nutrition des adolescents en l’Éthiopie, et non un élément isolé », a déclaré Ermias Mekuria, chargé de programme principal de Nutrition International dans le pays.

Inde

Saisir l’importance : La stigmatisation des menstruations entraîne des conséquences graves au quotidien. Selon l’enquête nationale indienne sur la santé familiale (2015-16) dans l’Uttar Pradesh, plus de 50 % des adolescentes ne connaissent pas les pratiques sûres et hygiéniques pendant les menstruations et moins de 30 % des adolescentes âgées de 15 à 19 ans utilisent des serviettes hygiéniques lorsqu’elles ont leurs règles. Ces difficultés émanent de nombreux facteurs interconnectés, dont la disponibilité des produits pour les règles, leur qualité et leur coût. De plus, des études montrent que les obstacles ne manquent pas : accès à des toilettes hygiéniques, mécanismes d’élimination des produits usagés, mythes et idées fausses sur les pratiques d’hygiène menstruelle et des connaissances limitées en matière de nutrition peuvent créer un environnement difficile lorsqu’une fille a ses règles.

« Pour fournir de meilleurs services nutritionnels aux adolescentes, nous devons faire en sorte qu’elles restent à l’école ou qu’elles aient accès à des centres de santé de proximité afin d’obtenir ces importants services. »

Trouver des solutions : Nutrition International concentre ses efforts sur la gestion de l’hygiène menstruelle dans le pays. L’organisme a lancé un projet pilote dans le district de Chandauli en Uttar Pradesh qui vise à atteindre environ 70 000 adolescentes. Amorcé en 2020, le projet pilote s’appuie sur le travail déjà fait auprès du gouvernement de l’Uttar Pradesh, soit le renforcement des programmes de nutrition des adolescents dans les écoles et les centres de santé locaux de l’État.  « Pour fournir de meilleurs services nutritionnels aux adolescentes, nous devons faire en sorte qu’elles restent à l’école ou qu’elles aient accès à des centres de santé de proximité afin d’obtenir ces importants services », a déclaré Kamalini Mukhopadhyaya, agente de programmes de Nutrition International en Inde.

Le projet pilote s’adresse aux enseignants, aux directeurs d’école, aux principaux responsables gouvernementaux et à d’autres agents de santé de première ligne pour améliorer leurs connaissances sur la gestion de l’hygiène menstruelle. Cette formation renforce ainsi leur capacité à présenter le programme aux adolescentes à l’avenir. L’initiative mobilise également les gouvernements de l’État et des districts pour qu’ils assurent la viabilité financière du programme au‑delà du projet pilote.

Une formation de formateurs a eu lieu en 2021; ces formateurs principaux travailleront en étroite collaboration avec les écoles et les anganwadis (centres de nutrition et de santé) pour donner aux adolescents les connaissances nécessaires en matière d’hygiène menstruelle, y compris éliminer la stigmatisation associée aux menstruations. Adapté au contexte de la COVID‑19 et aux fermetures d’écoles en cours, le projet pilote veille tout de même à améliorer les pratiques d’hygiène menstruelle dans le district et à éliminer les obstacles qui empêchent les filles de gérer facilement leurs règles.

Sénégal

Saisir l’importance : La santé reproductive des adolescents est un sujet tabou au Sénégal. Lorsqu’une fille a ses premières règles, elle a souvent très peu d’informations sur ce qui se passe dans son corps et sur ce à quoi elle doit s’attendre. « Elles ont honte et elles ont peur, sentiments qui entraînent une diminution de la confiance chez les filles, notamment en ce qui concerne leur sexualité et leur santé reproductive », explique Amadou Moctar Ndiaye, responsable du programme de santé et de nutrition des adolescents de Nutrition International au Sénégal. Le manque d’information fait perdre aux filles de nombreuses heures de cours et de loisir, par exemple lorsqu’elles ne vont pas à l’école pendant leurs menstruations ou qu’elles cessent de participer à d’autres activités en dehors de la maison. De plus, certaines familles n’ont pas les ressources financières pour se procurer des serviettes hygiéniques. Les filles utilisent alors des morceaux de tissu qui peuvent provoquer des infections s’ils sont mal entretenus. La COVID-19 a aggravé le fardeau économique des ménages, rendant encore plus difficile l’accès des filles aux produits essentiels.

« À la fin de ce projet, nous espérons que les adolescents comprendront mieux leur santé reproductive et l’hygiène menstruelle, qu’ils auront une meilleure santé, qu’ils seront plus épanouis et qu’ils réaliseront pleinement leur potentiel »

Trouver des solutions : En 2019, Nutrition International a démarré le projet « Fort pour le Futur » à Thiès pour améliorer la santé et le bien-être des adolescents de la ville. Son approche intégrée regroupe l’éducation nutritionnelle, les suppléments de FAF, les services de santé reproductive ainsi que des connaissances et la gestion de l’hygiène menstruelle. Le projet a créé trois espaces pour adolescents, trois unités sanitaires mobiles et un centre de conseil pour les adolescents, en plus de travailler activement dans les écoles. Chaque point de prestation fournit gratuitement des serviettes hygiéniques lavables et réutilisables.

Le projet prévoit de toucher 15 000 adolescentes. Il mobilise aussi activement les garçons grâce à des discussions. Ces discussions portent sur les bonnes pratiques d’hygiène, la nutrition, la santé reproductive, et la compréhension des menstruations pour réduire la stigmatisation. « À la fin de ce projet, nous espérons que les adolescents comprendront mieux leur santé reproductive et l’hygiène menstruelle, qu’ils auront une meilleure santé, qu’ils seront plus épanouis et qu’ils réaliseront pleinement leur potentiel », a déclaré Ndiaye.

Le participation a été intégrée dans la configuration du programme. En effet, depuis le début, le projet encourage les associations pour les jeunes et les adolescents à participer dans des activités centralisés sur la communication, l’éducation et le plaidoyer. Bien que la pandémie de la COVID-19 ait interrompu le plan initial du programme, le projet a pu diffuser des messages clés avec des adolescentes au-delà des frontières de la ville grâce aux médias sociaux et aux plateformes digitales.

Le début des menstruations représente une étape de croissance importante, ayant le potentiel de produire des effets négatifs sur l’éducation des filles, ainsi qu’à leur accès à l’information en matière de santé et nutrition. Les femmes et les adolescentes devraient tous pouvoir vivre librement durant leurs menstruations — nous avons certainement du pain sur la planche.