Malama Nafisa Almustapha, 34 ans, pensait que sa fille allait mourir avant le lever du jour. Hussaina, son bébé de quinze mois, souffrait d’un épisode de diarrhée grave depuis cinq jours. Très faible, Hussaina avait perdu l’appétit. Nafisa connaissait bien les conséquences d’une diarrhée grave : deux autres enfants dans sa communauté de Gagi à Sokoto, au Nigéria, y avaient déjà succombé.

Parce qu’elle pensait ne pas avoir les moyens de payer le coût des médicaments et de la consultation du médecin, Nafisa avait décidé, plus tôt dans la semaine, de ne pas amener Hussaina au centre de santé de sa communauté. Elle lui a plutôt donné un remède à base de plantes. Mais la situation s’est aggravée. Elle s’est ensuite adressée à un trafiquant de médicaments de la communauté qui lui a donné un antibiotique, mais celui-ci n’a ni résolu ni réduit la gravité des épisodes de diarrhée.

« J’ai demandé aux gens autour de moi de commencer à creuser sa tombe », a déclaré Nafisa.

Selon l’Organisation mondiale de la Santé, le Nigéria affiche le nombre le plus élevé de décès d’enfants de moins de cinq ans dans le monde. En 2019, on a attribué dix-huit pour cent de ces décès à la diarrhée – le pourcentage le plus élevé de tous les pays.

En 2021, l’Alliance zinc en faveur de la santé de l’enfant (AZSE) a soutenu le gouvernement du Nigéria dans la mise en œuvre d’un programme qui fournit un traitement combiné à base de zinc et de sel de réhydratation orale à faible osmolarité (SRO-FO) afin de réduire les conséquences de la diarrhée dans le nord du Nigéria. L’alliance est un partenariat entre le gouvernement du Canada, Teck Resources Limited et Nutrition International.

Le programme fournit une assistance technique, une aide financière et des interventions éducatives pour la gestion de la diarrhée chez les enfants de moins de cinq ans. Il comprend deux volets. Le premier volet porte sur le renforcement du système de santé, notamment l’achat de zinc et de SRO-FO. Ces deux ingrédients administrés ensemble constituent un traitement efficace et peu coûteux qui permet de réduire la durée et la gravité des épisodes de diarrhée et d’aider les enfants à s’en remettre plus rapidement.

Le deuxième volet porte sur des interventions de communication pour le changement de comportement. Il veille à l’éducation et à la sensibilisation concernant la gestion de la diarrhée, tant pour les travailleurs de la santé que pour les parents. Il fournit du matériel éducatif pour aider la communication interpersonnelle entre les travailleurs de la santé et les soignants, tire parti des réseaux sociaux, produit des refrains publicitaires pour la radio et de courtes dramatiques télévisées. De plus, le volet se sert des applications de téléphonie mobile pour atteindre les conjoints et les partenaires des soignants primaires. Les responsables du volet organisent aussi des discussions guidées pour mobiliser la communauté sur la gestion de la diarrhée et les pratiques d’hygiène familiale.

Hussaina avait perdu l’appétit et passablement de poids après cinq jours de diarrhée persistante. À court d’options, Nafisa a emmené sa fille aux urgences du centre de santé. Gravement déshydratée, Hussaina avait perdu conscience et avait les yeux enfoncés, un pouls faible, une peau sèche et ridée et une respiration rapide. Le personnel sur place a déterminé qu’elle était en état de choc hypovolémique.

Le personnel du centre de santé avait suivi la formation de l’AZSE sur la gestion de la diarrhée grave. On a donc admis Hussaina et on l’a surveillée de près pendant les 24 heures qui ont suivi. La réhydratation a amélioré ses signes vitaux. Hussaina a bien réagi au traitement et elle a commencé à boire de l’eau par elle-même. On a montré à Nafisa comment administrer le traitement de zinc et SRO-FO à sa fille après avoir observé l’administration de la première dose.

« Lorsque nous avons emmené Hussaina aux urgences du centre de santé le matin même, le travailleur de la santé s’est occupé d’elle tout de suite. Il l’a soignée et tous les services étaient gratuits. Hussaina s’est rétablie », raconte Nafisa.

L’état d’Hussaina s’est cliniquement stabilisé et elle pouvait retourner à la maison. C’est à ce moment que les sages‑femmes formées au programme ont discuté avec les deux parents de la situation qu’ils venaient de vivre. Elles leur ont expliqué les causes probables de la diarrhée (dans ce cas, des biberons malpropres qui attiraient les mouches) et l’importance de consulter rapidement un centre de santé lors d’un épisode de diarrhée. Elles ont aussi souligné les moyens qui permettent d’éviter ce genre de situation, comme l’hygiène personnelle et environnementale, l’assainissement, et tout particulièrement le lavage des mains.

La famille a également reçu des conseils sur la manière de diversifier et d’enrichir leur alimentation en utilisant des aliments locaux. On les a aussi découragés de recourir à l’automédication et aux remèdes traditionnels pour toute maladie infantile.

On a affecté un agent de santé et un bénévole de la communauté à Hussaina pour assurer un suivi hebdomadaire à domicile. Lors de la première visite, Nafisa a confirmé que la diarrhée de Hussaina avait pris fin 48 heures après le traitement de zinc et SRO-FO. Constatant les pratiques d’assainissement à la maison, l’équipe a pu offrir des recommandations précises pour assurer l’hygiène personnelle et domestique au sein de la famille, comme l’entreposage de l’eau, les pratiques de nettoyage et l’élimination des déchets. Lors d’une deuxième visite de suivi, l’équipe a observé une amélioration importante de l’hygiène familiale.

Les membres de l’équipe du programme ont également rendu visite à la trafiquante de médicaments qui avait fourni un antibiotique à Nafisa. Connus sous le nom de « colporteurs de médicaments », ces individus revendent des médicaments sans aucune réglementation ni surveillance. L’agence nationale nigériane pour l’administration et le contrôle des aliments et des médicaments (NAFDAC) a condamné cette pratique en raison de ses conséquences potentiellement fatales.

La colporteuse a admis qu’elle utilisait un médicament appelé Flagyl pour traiter la diarrhée et qu’elle ne savait pas que le zinc et les SRO-FO constituaient un traitement efficace. L’équipe lui a donc expliqué comment traiter les maladies diarrhéiques chez les enfants avec ce traitement et lui a conseillé d’envoyer tous les enfants atteints de diarrhée au centre de santé. Après avoir suivi une formation, la colporteuse de médicaments est devenue l’une des bénévoles communautaires du projet. Elle diffuse maintenant les connaissances nécessaires et sensibilise les gens pour éviter les cas aussi graves que celui de Hussaina.

« Le programme est très important pour prévenir et réduire les taux de mortalité et de morbidité des suites d’une diarrhée aqueuse aiguë chez les enfants de moins de cinq ans. Il améliore également la condition des enfants qui connaissent des épisodes de diarrhée. », a déclaré Lanre Daodu, responsable principal de programme pour la santé et la nutrition des enfants au Nigéria chez Nutrition International.

M. Daodu explique les facteurs aggravants qui font qu’une diarrhée non maîtrisée peut conduire à la mort. « L’enfant peut devenir sous-alimenté en raison d’une alimentation inadéquate et des épisodes répétés de diarrhée. Il peut également succomber à la déshydratation provoquée par un épisode aigu de diarrhée. Malheureusement, ces deux états sont interdépendants. La sous-nutrition accroît la sensibilité de l’enfant aux infections, de sorte que l’enfant connaît des épisodes de diarrhée plus fréquents et plus graves, et à leur tour, les épisodes de diarrhée accélèrent le développement de la sous-nutrition. »

C’est pourquoi une approche holistique qui combine le traitement et la prévention est si importante.

« Je promets de suivre tous les conseils que les agents de santé ont donnés à ma famille », affirme Nafisa en se rappelant son expérience. « Je suis reconnaissante envers Dieu, les agents de santé du centre de santé et l’organisation qui a fourni au gouvernement les médicaments nécessaires au traitement de la diarrhée. »

Formée en 2011, l’Alliance zinc en faveur de la santé de l’enfant est un partenariat mondial entre Nutrition International, le gouvernement du Canada et Teck Resources Limited. L’alliance soutient l’administration du traitement de zinc et des SRO-FO pour assurer la survie de millions d’enfants. Au cours des dix dernières années, elle a soutenu des projets au Bangladesh, au Burkina Faso, en Éthiopie, en Inde, au Kenya, au Nigéria, au Pakistan et au Sénégal.

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